( Traduction assistée par IA de https://24plus.ilsole24ore.com/art/una-nuova-fase-la-bce-ecco-errori-evitare-AGBgYylB )
La zone euro est entrée dans une nouvelle phase. En décembre, la Banque centrale européenne (BCE) a manqué l’occasion de clore formellement l’ère de la forte inflation et d’en ouvrir une nouvelle, mais les données suggèrent que tout est véritablement en train de changer. La baisse des anticipations d’inflation à long terme sous la barre des 2 % est un élément clé, tout comme les prévisions de la BCE pour 2026, qui, dans l’horizon de la politique monétaire, pointent vers un taux moyen annuel de 1,9 %. Cela indique que l’objectif est, d’une certaine manière, à portée de main.
Vers une normalisation
Il est vrai qu’on ne peut pas encore crier victoire contre l’inflation : la présidente Christine Lagarde a raison. La politique monétaire reste justement restrictive, ne serait-ce que pour tenir pleinement compte des risques d’accélération des prix. Cependant, si l’on fixe le taux neutre – comme le suggèrent certaines analyses de la BCE – à 2,50 % (0,50 % de taux réel plus 2 % d’inflation), un taux de dépôt à 3 % donne effectivement l’impression que la phase de normalisation est en train de s’achever.
La fin de l’ère “non conventionnelle”
Il est temps de dresser un bilan. Le passé récent de la BCE a été tumultueux : la crise financière de 2008, la crise budgétaire de 2010 e la longue période de faible inflation traitées par des politiques massives de quantitative easing et des taux négatifs, la pandémie, et maintenant la flambée inflationniste. Tout dans la politique monétaire récente a été qualifié de “non conventionnel”. Désormais, à l’aube d’une phase de normalité relative – sous réserve des guerres commerciales – il semble également opportun de repenser les écarts imposés à la politique monétaire. Car ces écarts pourraient bien être interprétés comme de véritables erreurs à éviter à l’avenir.
Les objectifs monétaires
La première déviation concerne l’abandon par la politique monétaire de ses propres objectifs, qui sont, sans surprise, monétaires. L’inflation doit redevenir l’élément central. Le retard avec lequel l’accélération des prix, débutée en juillet 2021, a été affrontée (la première hausse de taux n’ayant été décidée qu’un an plus tard) a engendré des coûts importants. Certes, la situation n’était pas claire : il semblait s’agir d’une inflation “côté offre”, qu’il n’est pas d’usage de contrer. Mais la BCE connaît bien, et a déjà étudié en profondeur, les effets d’un choc énergétique sur les prix. Le retard a été excessif.
La centralité de l’inflation
C’est le moment idéal pour se concentrer exclusivement sur l’inflation. Le mandat de la Banque centrale européenne risque d’être “dilué” par des pressions politiques. Emmanuel Macron lui-même, dans un passé récent, a demandé d’étudier l’introduction de la croissance parmi les objectifs de la BCE. D’autres, notamment en Italie, ont été plus explicites et moins prudents. C’est une erreur, car la politique monétaire n’est pas un moteur de croissance. Avec des finances publiques sous pression – les demandes d’interventions étatiques étant nombreuses, voire excessives, et on va ajouter les dépenses militaires – le désir de maintenir des coûts de financement bas, et donc des taux faibles, se renforce. La Banque centrale européenne a souvent été invitée, directement ou indirectement, à soutenir les dettes publiques, sous des prétextes plus ou moins valables. Le résultat a été prévisible et constant : une propension accrue des gouvernements et des entreprises (parfois déjà “zombies”, vouées à l’échec) à s’endetter davantage, entraînant des déséquilibres financiers et une inflation qui trouvent un terreau fertile pour se développer.
Séparer la politique monétaire et la politique budgétaire
La volonté de lutter contre le réchauffement climatique – associée à celle de réduire la dépendance de la zone euro à l’égard des pays producteurs de pétrole instables ou peu fiables – a également poussé la BCE (comme de nombreuses autres banques centrales) à adopter des objectifs “verts”. Cependant, ces objectifs relèvent de la sphère budgétaire, et non monétaire. La séparation entre les objectifs budgétaires et monétaires, bien que parfois floue en pratique, reste essentielle. La démocratie – entendue ici comme démocratie représentative – est née autour des débats sur les dépenses publiques et la fiscalité qu’elles impliquent. Confier une partie de la politique monétaire à des institutions indépendantes était une nécessité : les gouvernements sont trop enclins à dépenser et, par conséquent, à vouloir des taux d’intérêt trop bas, au risque de stimuler l’inflation. Bien que l’indépendance des banques centrales ne puisse être remise en cause, la légitimité démocratique de la politique monétaire reste centrale. Outre les auditions parlementaires, cette question doit être abordée par deux exigences fondamentales : l’obligation de rendre des comptes, l’accountability, et la transparence.
La transparence perdue
La dernière phase de la politique monétaire, marquée par l’incertitude concernant l’évolution des prix, a poussé la Banque centrale européenne à faire un pas en arrière en matière de transparence. À l’instar de la Réserve fédérale (Fed), la BCE a renoncé à la forward guidance, c’est-à-dire à la communication explicite sur ses intentions futures. D’autres banques centrales continuent pourtant à utiliser cet outil, parfois sous des formes plus avancées que celles expérimentées dans la zone euro, par exemple en annonçant l’évolution future des taux d’intérêt. La BCE, en revanche, a choisi une approche basée sur des décisions “réunion après réunion”, se privant ainsi de la capacité d’influencer efficacement les marchés financiers pour atteindre plus rapidement et avec moins d’efforts ses objectifs. Cela a accru l’incertitude, réduit l’efficacité de son action et rendu ses mécanismes de décision plus opaques. Un retour à une plus grande transparence semble nécessaire, tant du point de vue opérationnel que politique. Dans une Union européenne de plus en plus critiquée pour son déficit démocratique, la transparence de la BCE – l’une des institutions les plus puissantes, et peut-être la plus “communautaire” – est essentielle.
L’impartialité niée
Encore plus importante est l’impartialité de la politique monétaire face à la redistribution des revenus. En 2021, la BCE a adopté un objectif d’inflation “symétrique”. Cela signifie qu’elle s’attaque autant à la surchauffe des prix – pour laquelle une approche préventive serait même nécessaire, vu les coûts en termes de croissance – qu’à leur refroidissement, soit à la désinflation, voire à la déflation. Cette solution est élégante, mais inefficace et injuste.
Les deux régimes de l’inflation
Les recherches menées par la Banque des règlements internationaux (BRI) montrent que le refroidissement des prix se manifeste de manière très différente de leur surchauffe. En termes précis : la désinflation et la déflation ont tendance à se stabiliser d’elles-mêmes, tandis que l’inflation tend à s’emballer. Cette distinction a été mise en lumière dans une étude de Claudio Borio, Marco Jacopo Lombardi, James Yetman et Egon Zakrajsek (The two-regime view of inflation), ensuite reprise dans le Rapport annuel 2022 de la BRI.
Objectifs manqués
Dans un passé récent, la BCE a combattu à la fois une faible inflation – qui était très probablement “positive”, non causée par une faiblesse de la demande, mais par des gains de productivité transmis via le commerce international – et une inflation élevée, bien que sans grande promptitude. Si les choses s’étaient déroulées comme prévu, les salaires réels des travailleurs (et pas seulement) n’auraient pas pu augmenter de manière saine et généralisée, alors que l’inflation les a réduits brutalement. Heureusement, tous les résultats escomptés ne se sont pas concrétisés : entre 2012 – le début de la politique de taux zéro – et 2019, les salaires en France ont augmenté de 6 % (selon les données de l’OCDE, ajustées au pouvoir d’achat), ceux en Allemagne de 11 %, et même ceux en Italie ont progressé de 2,4 %. (Aujourd’hui, les salaires réels italiens sont inférieurs de 3 % à leur niveau de 2000 et de 8 % à leur pic de 2010, mais les problèmes de l’Italie se trouvent ailleurs.)
Une symétrie abstraite
Après le sauvetage d’urgence de l’euro, avec le fameux “whatever it takes”, l’ère des taux négatifs et du quantitative easing n’a pas permis de stabiliser durablement l’inflation à 2 %. Au contraire, elle a encouragé l’endettement des entreprises zombies et des gouvernements, accru les déséquilibres sur les marchés financiers et contribué à la surchauffe des prix. Elle n’a pas soutenu l’activité économique, car – il est important de le rappeler – la politique monétaire n’est pas un moteur de croissance. Elle a ainsi favorisé les débiteurs au détriment des créanciers, sous prétexte d’une symétrie abstraite. Une partie de la défiance envers les systèmes libéraux – injustifiée et dangereuse, mais compréhensible, compte tenu des distorsions conservatrices qu’ils ont subies – trouve également son origine dans ces déséquilibres.
Le “croquemitaine” de l’inflation
Cela a été un choix conscient. Avant 2003, la BCE s’engageait simplement à maintenir l’inflation sous la barre des 2 %, un objectif correct, conforme aux analyses sur la diversité des régimes d’inflation. Une désinflation, voire une déflation saine qui ne se traduit pas par une contraction de la demande (ce qui n’arrive quasiment jamais : comme l’ont écrit Raghuram Rajan et Martin Feldstein, la déflation est un croquemitaine, un “bogeyman”), était tout à fait acceptable. En 2003, l’objectif a été modifié, ouvrant une phase qui apparaît aujourd’hui comme intermédiaire : la cible est devenue une inflation “inférieure mais proche de 2 %”. Cela a marqué le début d’une période d’interventionnisme accru, et d’une plus grande vulnérabilité aux erreurs de politique monétaire. L’adoption de l’approche symétrique en 2021 n’a fait qu’approfondir cette tendance.
L’objectif du 2000
Revenir à l’objectif pré-2003 serait probablement plus sage. Permettre à la politique monétaire d’être moins interventionniste, précisément au moment où la tentation d’intervenir est forte mais les résultats incertains, serait une décision judicieuse. Les recherches économiques montrent que baisser les taux et accroître le bilan des banques centrales peut avoir des effets limités sur l’inflation et la croissance, tout en augmentant considérablement les déséquilibres financiers. Limiter les interventions de la politique monétaire aux situations où le seuil de 2 % est menacé laisserait également aux banques centrales la possibilité d’agir sur les cycles financiers. La dernière récession provoquée par un effondrement soudain du sommet d’un cycle financier, combiné à des taux trop bas – la Grande Récession – n’a pas encore été totalement surmontée, bien que le PIB ait partout dépassé son niveau d’avant la crise.